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  • Photo du rédacteurJulie

Le Tour d'Europe en (presque) 80 Jours

Quel moyen de transport choisir quand on a 26 et 28 ans, deux mois devant nous pour visiter l’Europe et aucune envie d’avoir une carte de fidélité Flying Blue ? Si de Tintin à Indiana Jones tous les héros roulent en side-car, alors pourquoi pas nous !?


Début 2017, nous sommes dans notre clapier parisien, l’une venant de finir ses études et l’autre rêvantde quitter son travail. Tous deux passionnés de moto et roulant au quotidien, l’idée nous vientde partir faire un tour, un grand tour. C’est la période de la campagne présidentielle et on entendpartout parler de l’Europe. L’Europe... On y vit, il n’y a pas vraiment de frontières entre ses pays, ony paie presque partout en Euro... Mais finalement qu’est-ce qu’on en connait vraiment ? Pour notrepart, au-delà des pays frontaliers, pas grand chose ! Il n’en fallut pas beaucoup plus pour nous décider.




Nous étions à l’époque propriétaires d’un side-car Royal Enfield / Black Pearl qui nous avait

permis l’apprentissage de la conduite des ces moutons à cinq pattes en quelques 20 000

kilomètres la première année. L’idée du side-car pour voyager présentait pour nous plusieurs avantages : sa conduite récréative, son image surannée qui lui confère un incroyable capital sympathie et facilite le contact et les rencontres, sa capacité de chargement pour être au maximum en autonomie et enfin le fait de pouvoir nous relayer à son guidon afin d’être tantôt pilote, tantôt spectateur de ce voyage.


Nous choisissons de remplacer notre attelage Royal Enfield pour un side-car Triumph Scrambler / Black Pearl Zébu pour bénéficier de plus de puissance et pouvoir augmenter la moyenne kilométrique dans les grands espaces. Après la réflexion logistique, nous étions pressés de partir, le trajet fut donc rapidement esquissé dans ses grandes lignes après seulement 10 minutes à regarder la carte de l’Europe. Peu enclins à la préparation en amont, nous choisissons juste un trajet qui ne demande aucune démarche administrative. Le voyage pouvait commencer.


Départ de Chamonix (d’où Guillaume est originaire) juste après la fonte des neiges, au lendemain des élections présidentielles. Nous partons par l’Italie, le lac de Côme, une visite du musée Guzzi puis la côte nord italienne nous amène sans encombre jusqu’à la Slovénie. Nous traversons ce petit pays plein de charme direction la côte Adriatique. À partir de là, le rythme est pris, le partage des tâches se met en place naturellement, le voyage devient un quotidien.




Après la grisaille slovène, c’est le soleil qui nous accueille pour entamer la descente de la côte Adriatique. La route se déroule sous nos pneus dans un enchaînement de virages ciselés, avec sur notre droite la mer qui ne nous lâche plus. Nous sommes mi-mai ce qui nous permet de profiter des paysages Croates et de la météo sans avoir trop de camping-cars en ligne de mire. Nous passons ensuite au Monténégro dans la baie de Kotor, une sorte de fjord méditerranéen improbable et majestueux. Nous passons une nuit chez l’habitant et repartons le lendemain pour attaquer l’Albanie.




Nous ne savons pas trop à quoi nous attendre avec ce pays car finalement on en parle peu et ce n’est pas une destination touristique très populaire. Après un rapide coup d’oeil sur Google nous choisissons Vlora, « la Riviera Albanaise », comme point de chute et réservons une chambre dans une petite maison d’hôtes, premier abri en dur du voyage. Après une arrivée chaotique dans ce qui nous semble être un terrain vague, notre hôte s’excuse de l’état de la route et nous explique que tout le monde passe par la plage car la route est trop mauvaise. Après avoir posé nos bagages, nous partons explorer Vlora. Bon, pour les plages de sable fin on repassera, mais la ville qui semble à la fois à l’abandon et en pleine construction nous fascine. Le dépaysement est là.


Après deux nuits, nous reprenons la route pour filer jusqu’en Grèce, et quelle route ! Entre côte et montagne, de beaux lacets surplombent la mer turquoise, des animaux gambadent en liberté et le soleil de mai est figé dans un ciel azur. Une traversée de rivière sur un petit radeau et nous voilà en Grèce.




Nous quittons la côte pour rentrer dans les terres, direction Delphes pour passer la nuit. Nous profitons de la fraîcheur du matin pour visiter son site archéologique et prenons ensuite la direction de Kalambaka où nous rejoignons quelques amis side-caristes qui font un tour de Grèce. Nous mettons ces moments de convivialité à profit pour nous reposer quelques nuits dans un hôtel et visiter les Météores, de gros monolithes de roche grise qui semblent avoir été posés là par les dieux grecs et leurs temples hauts perchés. Nous en profitons aussi pour changer le pneu du panier, la route est encore longue. Nous continuons à tirer à l’est et, après le mont Olympe, nous arrivons sur la côte de la mer Égée.



Deux jours plus tard, nous atteignons la Turquie, direction Istanbul ! Enfin… Pas si vite. Après un passage de frontière interminable, la route devient une ligne droite de 300 kms à travers une steppe monotone. Vers 14h, nous abordons Istanbul. La ville a l’air immense, les immeubles et les routes semblent s’étendre de manière tentaculaire, la circulation se fait très dense. Nous parvenons tant bien que mal à trouver l’hôtel réservé la veille, posons nos affaires et partons voir ce que cette ville a à offrir.


Entre les visites de la Mosquée Bleue et de Sainte-Sophie, Les Jardins de Topkapi et le Grand Bazar, on ne sait plus où regarder ! Mais la ville a bien plus à montrer que ses monuments néanmoins grandioses : les fresques de street art, les petits bars branchés à l’orientale, les rues bondées, remplies d’odeurs et de couleurs ravissent tous nos sens. Nous prenons même le temps de faire un tour 5 minutes en Asie en traversant le Bosphore par le pont Sultan Mehmet au soleil levant avant de reprendre la route.




Nous arrivons quelques heures plus tard en Bulgarie. Après une petite frayeur à la frontière où nous avons bien cru que les douaniers allaient nous faire vider l’intégralité du side, nous prenons la direction de Burgas ville balnéaire réputée pour être «la Perle de la Mer Noire». Après que le GPS nous ait perdu une dizaine de fois et nous être vu refuser l’accès de plusieurs campings, nous nous arrêtons dans un petit hôtel, fatigués et bien décidés à quitter ce pays peu accueillant dès le lendemain matin afin de rejoindre au plus vite Bucarest en Roumanie. Au plus vite de toute façon on ne pouvait pas faire autrement car depuis la veille nous avions réalisé que la vitre de notre bocal de frein était cassée rendant le frein avant inutilisable !


En arrivant à Bucarest nous trouvons rapidement un petit garagiste qui nous bricole une réparation gratuitement, réparation qui tiendra d’ailleurs jusqu’à la fin du voyage. La ville est sympathique, le moderne y côtoie l’ancien, dans l’architecture mais aussi dans les concepts des bars/restaurants et le retour à une langue latine rend le contact plus facile. C’est donc sur de bonnes vibrations que nous continuons le voyage à travers la Roumanie. Nous traversons les Carpates et visitons Bran et le célèbre château de Vlad l’Empaleur (aka Dracula). La route à travers la Transylvanie et aussi belle que son état est mauvais mais cela n’enlève rien au charme et au folklore de cette région tout comme les nombreux animaux croisés sur la route et les charrettes tirées par des chevaux.



Quelques 500 kms plus tard nous voici à Budapest, en Hongrie. Nous profitons d’un camping motard au coeur de la ville pour nous reposer, visiter et acheter des pneus. Cela faisait un mois tout pile qu’on était sur la route, nous avions parcouru 7000 kms et traversé 12 pays ! Nous quittons Budapest après quelques jours avec comme nouvelle étoile du berger le Cap Nord.


Avant d’en arriver là, nous traversons la Slovaquie accompagnés d’une pluie diluvienne du matin au soir. On se dit que la route à travers la forêt devait vraiment être sympa par temps sec. En parlant de la météo, elle est bien plus clémente le lendemain et nous permet de rouler jusqu’en Pologne. Nous arrivons vers 11h du matin à Auschwitz, c’est une visite marquante d’un lieu dont on nous a tant parlé mais qu’on peine à imaginer. Après ce stop empreint d’émotion nous reprenons la route à travers la Pologne, pays le plus plat et interminable que nous ayons traversé, pour finalement arriver assez tard à Varsovie. Après un changement de filtre à air, la visite du Musée de l’Insurrection et des rencontres sympas au camping, nous voilà prêts à partir à l’assaut des pays Baltes.



Changement de décor radical en Lituanie, forêt sinueuse et reliefs nous accompagnent jusqu’à un lac au bord duquel nous passons la nuit. Lituanie, Lettonie et Estonie s’enchaînent dans des paysages sauvages, peu de grandes villes et beaucoup de lacs, un calme propice au rêve. Le lendemain, le soleil nous porte jusqu’à Tallinn, une ville assez étonnante où nous faisons changer le pneu arrière en prévision du Grand Nord dans un coffee- shop-garage : Renard Speed Shop. Une boutique à la pointe de la tendance des magasins de motos «vintage» dans une friche industrielle de Tallinn ! Nous passons une nuit dans cette ville qui est une très bonne surprise histoire de visiter avant de prendre le ferry pour la Finlande le lendemain soir.


Après une courte nuit en bateau nous découvrons Helsinki au petit matin. Nous passons 3 jours chez des amis afin de nous habituer aux coutumes locales : barbecue en pleine forêt, balades sur les îles environnantes et bières locales dans les bars. Ici, la nature et la vie urbaine se mêlent d’une manière fascinante. 43ème jour de voyage, nous entamons à présent la montée au nord : 1500 km à travers des forêts de pins. Deux jours plus tard, à Rovaniemi, nous passons le Cercle Polaire Arctique. La température de 2 degrés, la pluie glaciale et le vent mordant se chargent de nous le rappeler à chaque instant. Point positif de cette météo plutôt fraîche, nous n’avons pas vu l’ombre d’un moustique qui est réputé à cette période pour être le fléau de la Finlande. Pour se réchauffer et sécher les vêtements nous décidons de passer la nuit dans une petite cabane dans les bois près du lac d’Inari. Au

matin nous avons la désagréable surprise de constater que la batterie de la moto n’a pas résisté au froid polaire. Après avoir poussé le side pendant une heure sous le regard indifférent des camping-caristes, nous arrivons à redémarrer. Ça aura eu l’avantage de nous réchauffer… Le changement de batterie se fera, Laponie oblige, dans une concession moto-neige !



Après avoir gardé le cap au nord pendant 6000 km nous ne pouvons finalement pas aller plus haut car ça y est, après 47 jours de voyage nous avons atteint le Cap Nord, deux jours après le solstice d’été, le bout du monde quoi ! Après quelques photos du globe en fer, nous passons une nuit bien méritée dans la tente, sous le soleil de minuit norvégien. Nous filons désormais au sud, direction Alta.



Le soleil fait scintiller la neige qui borde encore la route déserte, seuls quelques groupes de rennes ponctuent notre trajet. En fin d’après-midi, un cycliste visiblement intrigué par notre attelage nous parle un peu et nous propose finalement le gîte pour la nuit. Une superbe rencontre qui nous permet d’en savoir plus sur le mode de vie norvégien. La descente continue le lendemain matin, après un stop à Narvik nous atteignons les Lofoten. On ne sait plus où regarder tellement c’est majestueux : la mer, la montagne, les virages, les fjords… Après une nuit ensoleillée à Å nous prenons un ferry pour rejoindre les terres. Les kilomètres s’enchaînent, la Norvège c’est beau mais c’est long ! Nous faisons encore un stop à Trondheim puis à Halden, non loin de la frontière suédoise.



En partant de Halden le lendemain matin, on aurait jamais cru traverser 4 pays dans la journée. Norvège, Suède puis Danemark pour enfin arriver vers 22h à Flensburg en Allemagne après 800 km sous la pluie. L’envie de rentrer au bercail se fait sentir. On avance à travers l’Allemagne dont les autoroutes, entre travaux et bouchons, sont celles où on aura roulé le moins vite. Après l’Allemagne et le «plat pays» nous arrivons enfin en France, à Brunoy en région parisienne, chez notre ami Jean Burdet (Alternative Side-car) pour un arrêt au stand, tant pour nous que pour notre attelage. Finalement, les 80 jours prévus à la base pour ce voyage se sont transformés en 57, ce qui ne nous aura pas empêché de traverser 22 pays, de parcourir 20000 km, et finalement d’avoir pu découvrir un petit peu de notre vieux continent : L’Europe.



Destination : Tour d’Europe

Durée du voyage : 2 mois

Distance couverte : 20000 kms

Nombre de personnes : 2

Moto(s) employée(s) : Triumph Scrambler en Side-car Black Pearl

Budget moyen par personne: 2000 €

La bonne adresse : Bikercamp à Budapest

A voir absolument : La Finlande pour se sentir seul au monde et l’Albanie pour se marrer

A éviter : Un problème mécanique en Bulgarie

Des difficultés particulières : Supporter son compagnon de voyage !!!

La meilleure période pour partir : début mai

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